Cet ouvrage, qui est devenu aujourd'hui un classique de la sociologie du travail française, est le fruit d'une enquête empirique par observation participante sur le travail en atelier au sein d'une grande entreprise de la métallurgie lyonnaise dans les années 1970. En rejetant dos à dos la fiction d'une organisation scientifique du travail et les discours misérabilistes sur la condition ouvrière, Philippe Bernoux jette les bases d'une théorie de l'appropriation du travail qui a influencé ensuite de nombreux observateurs des mondes productifs contemporains. Plus que jamais d'actualité, cet ouvrage initialement publié chez Privat en 1981, est enrichi de textes inédits qui permettront de resituer le contexte de cette recherche et d'en saisir les échos contemporains.Cette nouvelle édition éclairera toutes celles et tous ceux qui portent intérêt au travail et à ses mutations (syndicalistes, étudiantes et étudiants, femmes et hommes d'entreprises, etc., et bien sûr spécialistes des sciences sociales du travail).
Sous couleur de jouer : la formule est de Claude Lévi-Strauss. Elle donne à croire que la conduite ludique dissimule sa véritable essence. Que fait celui dont on dit qu'il joue?Au départ de ce livre, il y a le refus de prendre le jeu pour quelque chose qui va de soi, pour une manière d'être et de faire immédiatement abordable et déchiffrable: l'intention de le considérer plutôt comme une attitude mentale, une aventure intérieure presque impossible à saisir, que l'on ne parvient à identifier, à désigner, à décrire qu'au moyen de mots. Nul ne se comprend, ne se fait comprendre qu'en passant par des façons de dire (et de penser) tirées de l'expérience commune.La Psyché de Pierre Corneille, dans son trouble, découvre cette évidence :Et je dirais que je vous aime,Seigneur, si je savais ce que c'est que d'aimer.Ainsi, le joueur ne peut dire qu'il joue, ne peut dire s'il joue – et d'abord ne peut jouer qu'à la condition de savoir ce que c'est que le jeu.Rencontrée en cet étrange détour, l'idée de Jeu relève plus d'une approche anthropologique que d'une élucidation d'ordre psychologique. Quand on s'attache à traiter de l'indicible, ne convient-il pas, au moins pour commencer, de prêter attention à ce qui s'en dit?Publié initialement par José Corti en 1989, épuisé depuis plusieurs années, il était urgent de rééditer cet ouvrage fondamental de Jacques Henriot, permettant tout autant de penser le jeu que de critiquer des pensées trop rapides pour analyser ce qui fait jeu et, peut-être plus, le jouer.
Cet ouvrage est le fruit de nombreux échanges avec les acteurs du monde des livres : éditeurs, libraires et bibliothécaires. Il analyse l'évolution rapide des métiers du livre et les réalités de terrain, dont les évolutions sectorielles et leurs transformations avec l'arrivée du numérique ont généré l'émergence de nouvelles compétences.Ont contribué à cet ouvrage : Isabelle Boutoux, Alain Busson, Marie-Laure Cahier, Aude Chauviat, Antoine Fauchié, Frederique Giraud, Celine Guillot, Aude Inaudi, Marc Jajah, Florence Lethurgez, Florence Rio, Ugo Roux, Jean-Louis Soubret, Emmanuël Souchier, Elsa Tadier, Albane Toussaint, Olivier Vanhée.
La (re)parution dans la Bibliothèque idéale des sciences sociales (Bi2S) de l'ouvrage de Georges Liénard et Émile Servais donne enfin à connaître à la communauté scientifique une enquête injustement méconnue. En effet, s'il a été publié en 1978 en Belgique aux éditions Vie ouvrière, ce livre a peu circulé en France. Il s'agit donc presque d'y donner accès pour la première fois.Issu d'une thèse de sociologie réalisée en binôme, il rend compte de l'une des premières enquêtes sur la socialisation des enfants conduite au domicile des familles de différentes classes sociales. La nouvelle préface de Stéphane Bonnéry, après celle de Jean Remy et Jean-Claude Chamboredon, ainsi que la postface de Georges Liénard, Éric Mangez et Hugues Draelants soulignent son caractère précurseur pour la sociologie de l'éducation et des enfants.Ainsi ce livre décrit les pratiques de socialisation différenciée selon les groupes familiaux de diverses classes sociales, les trajectoires inter et intragénérationnelles dans lesquelles elles s'inscrivent, les représentations que les enfants et leurs familles se font de leur avenir notamment le travail espéré et la position sociale à laquelle ils aspirent. À partir de ces descriptions approfondies, l'analyse sociologique montre comment les pratiques de socialisation différenciée sont à la fois une accoutumance et une intériorisation de la position sociale future.
Rééditer, avec une préface qui la contextualise, cette œuvre majeure de Marc Augé, était une impérieuse nécessité.Issue d'une thèse d'État et publiée il y a près d'un demi-siècle, elle avait fortement marqué l'anthropologie française. Mettant en regard les systèmes symboliques (institutions sociales, représentations du monde et de la personne, croyances et rites) de trois ethnies du Sud de la Côte d'Ivoire, Marc Augé y propose le concept " d'idéo-logique ": sorte de grammaire irréductible à toute causalité matérielle, au travers de laquelle se formulent, pour chacune d'entre elles, le possible et le pensable.Et, de manière encore plus novatrice, il montre comment les croyances en la sorcellerie se déploient au sein de cet " idéo-logique " en véritable théorie du pouvoir, c'est-à-dire en " possibilité effective d'action sur les hommes et sur les choses ".Les ouvrages et les articles sur la sorcellerie en Afrique s'étant multipliés ces dernières années, lire ou relire les analyses qu'en proposait Marc Augé ne pourra que leur donner davantage d'actualité
Une enquête au musée Granet, augmentée d'études sur la réception de la peinture et de la musique
La sociologie de la réception artistique essaie de tirer les conséquences du fait – souvent rappelé théoriquement, mais plus rarement exploré empiriquement – que les œuvres n'existent et ne durent que par l'activité interprétative de leurs publics: lecteurs ou spectateurs figurent toujours en tiers entre le sens dont l'artiste a doté une œuvre et celui qu'elle prend pour ceux qui la reçoivent.Pour saisir ces réceptions en actes qu'en 1987, une équipe d'enquêteurs emmenée par Jean-Claude Passeron et Emmanuel Pedler avait suivi les visiteurs du musée Granet d'Aix-en-Provence, chronomètre en main. L'objectif: mettre en évidence les ressorts sociaux du " temps donné aux tableaux ". C'est de cette étude originale que rend compte cet ouvrage initialement paru en 1991, et qui a été beaucoup plus souvent cité que véritablement lu.La réédition qu'en propose aujourd'hui la Bibliothèque idéale des sciences sociales est augmentée de plusieurs textes importants dans lesquels les deux sociologues ont poursuivi ces analyses sur la réception des œuvres artistique, à la fois dans le domaine pictural et dans le domaine musical. S'attachant à décrire et mesurer précisément les " pactes " de réception artistique qui se nouent ainsi entre les œuvres et leurs publics, l'ensemble propose une sociologie centrée sur le sort réservé à des œuvres singulières, qui se distingue de la sociologie de la consommation culturelle qui occupe encore aujourd'hui la plus grande place dans les enquêtes en sociologie de la culture. Elle vise en effet à identifier les actes sémiques de l'expérience esthétique en les cernant par des indicateurs objectifs – ce en quoi elle relève pleinement de la sociologie d'enquête.En complément de cet ensemble de textes, un long entretien avec Jean-Claude Passeron et Emmanuel Pedler permettra aux lecteurs de découvrir la perspective générale dans laquelle s'inscrivait cette enquête exemplaire, et comment elle a influencé leurs travaux ultérieurs. Enfin, fait probablement inédit, cette réédition met à la disposition des lecteurs les données originales de l'enquête, leur permettant ainsi de prolonger par eux-mêmes les analyses des auteurs et d'explorer plus avant les pistes ouvertes par une approche dont la fécondité heuristique reste toujours aussi vive.
Rééditer Pour une géographie du pouvoir près de quarante ans après sa publication initiale en 1980 constitue une forme de manifeste, tant la réception de ce livre a été contrastée: décrié par ses pairs au moment de sa sortie, reconnu aujourd'hui par Claude Raffestin lui-même comme " hétérodoxe ", il s'agit d'un ouvrage qui continue de marquer durablement ses lecteurs. S'il reste d'une actualité si vive aujourd'hui, c'est parce qu'il aurait pu s'intituler Pour une géographie du territoire, notion centrale dans la géographie contemporaine. Il définit en effet la territorialité comme médiation spatiale des rapports sociaux, un apport majeur pour toutes les sciences sociales. Proposant de mettre en avant l'espace d'autonomie qui existe dans la perception et la construction d'une relation de pouvoir, l'ouvrage exprime une géographie engagée qui pose les bases de la géopolitique critique. Par la centralité de son analyse relationnelle, son examen des ressources et des flux, il ouvre des pistes vers une écologie politique alors inédite.
Malgré les progrès des outils informatiques, mener une enquête sociologique, c'est-à-dire interroger des personnes sur leurs opinions, leurs pratiques, leur situation, leur passé, etc., reste une opération souvent coûteuse en temps et en moyens. Et le risque est grand pour ceux qui s'y lancent d'être ensuite noyés sous la masse des données collectées. Heureusement, il existe des méthodes efficaces pour réaliser le dépouillement d'une enquête et ne pas se contenter des résultats superficiels livrés par le simple examen de la distribution des réponses. Cet ouvrage présente de façon pédagogique plusieurs méthodes avancées d'analyse statistique des données d'enquête, en particulier l'analyse factorielle des correspondances et la régression logistique, qui, en utilisant des logiciels désormais de plus en plus faciles d'utilisation, permettent d'exploiter en profondeur les données.
La republication de cet Imaginaire de Marseille intervient au lendemain de l'année 2013 qui a vu la cité phocéenne, élue capitale européenne de la culture, faire l'objet d'une redécouverte médiatique et d'un remodelage urbanistique spectaculaire dans le secteur de la Joliette. Emblématique de son identité portuaire, cette zone est aussi longtemps restée dans un coin sombre de l'imaginaire de la ville.C'est ce jeu ambigu d'images et de représentations que cet ouvrage propose d'éclairer dans une vaste introspection historique et une lecture de géographie culturelle, croisant les discours et l'iconographie produite par l'élite locale avec l'interprétation des pratiques populaires. L'imaginaire de Marseille, qui voit la ville comme une charnière entre la France et l'Europe d'un côté, la Méditerranée et le monde de l'autre, se construit durant le premier XIXe siècle dans un mouvement qui porte ses marchands sur tous les océans, et voit affluer dans ses murs des populations diverses. Sa cristallisation se produit avec l'apogée de l'Empire colonial. À partir de la Seconde Guerre mondiale, la rétraction des horizons économiques marseillais, coïncidant avec l'extension métropolitaine et le bouleversement des pratiques urbaines, conduit à une crise de cet imaginaire, crise qu'affrontent encore aujourd'hui tant les responsables politiques que les citadins ordinaires.