Les Pays-Bas exercent depuis toujours une fascination sur le public français. Géographiquement proche, le pays semble si différent. Les voyageurs français ne s'y sont pas trompés. Dès 1600, les premiers curieux s'y pressent pour assister à la naissance de la République des Provinces-Unies au cours d'une guerre homérique. Les récits de voyage offrent un regard insolite sur un pays et une société en devenir. La société urbaine, le commerce maritime et la coexistence confessionnelle captivent. Même lorsque l'alliance franco-néerlandaise du temps d'Henri IV appartient au passé, la " Hollande " reste omniprésente. Le cycle iconographique de Versailles en témoigne avec brio. En dix essais, ce recueil livre la perception française du Siècle d'Or néerlandais, à travers les journaux de voyage et l'iconographie. Un voyage en terre inconnue.
2e période 1792-1803. Silly-en-Multien, de la Convention au Consulat
Suite de la période (1771-1792) déjà publiée, la seconde partie récemment retrouvée du passionnant journal de Pierre-Louis-Nicolas Delahaye (1745-1805), maître d'école et clerc paroissial de Silly-en-Multien, village de l'ancien diocèse de Meaux, couvre l'époque cruciale d'octobre 1792 à 1803, de la Convention au Directoire et au Consulat. Observateur sagace, témoin privilégié et acteur local au cœur de la communauté, l'auteur propose un récit vivant et circonstancié des événements vécus avec ses concitoyens, témoignant de la réception de la Révolution au village, mis à l'épreuve de la guerre, des crises et des bouleversements politico-religieux. Se révèle aussi le parcours d'un personnage attachant enraciné en son siècle d'ombres et de Lumières, l'homme privé dans son environnement familial et professionnel comme l'homme public, chrétien et patriote confronté à la plus formidable accélération du " temps court " de notre histoire.
Souvenirs des élèves du département du Nord (1920)
En mai 1920, à l'occasion de la tenue à Lille d'une Exposition internationale pour la renaissance des régions libérées, Georges Lyon, recteur de l'académie de Lille demande aux enseignants de répondre à un questionnaire, à leurs élèves de rédiger une composition française sur le thème de leurs souvenirs de la guerre et de faire le récit d'un épisode dramatique dont ils auraient été le témoin ou l'acteur. Ce sont les 152 compositions produites par les élèves des six arrondissements du département du Nord aux deux tiers occupés par les Allemands qui sont ici publiées. Conservées dans les fonds de La Contemporaine (Nanterre), elles n'ont jamais été exploitées systématiquement faute d'une publication, accompagnée d'un appareil critique. Témoignages directs d'enfants pour certains, d'adolescents pour d'autres, elles ne sont pas une vision de la Première Guerre mondiale "par le petit bout de la lorgnette". Elles rassemblent les souvenirs de jeunes témoins qui ont connu la mobilisation de membres de leurs familles. Le choc de l'invasion allemande avec ses pillages et ses exactions, le froid, la faim, les représailles les bombardements aériens… C'est ce qui fait de ces textes des documents attachants et surtout précieux pour saisir l'expérience de la guerre par de jeunes enfants. En même temps, ils mettent en lumière le rôle de l'École dans la construction de la mémoire de la Première Guerre mondiale.
En 1914, la résistance de la place-forte de Maubeuge fut la plus longue. Elle suscita une vive polémique politico-militaire autour du gouverneur Fournier, laissant cours à deux légendes : l'investissement par 60 000 Allemands et si " Maubeuge avait tenu 24 h de plus " le sort de la guerre eut été changé. Le journal du VIIe CAR de von Zwehl publié en 1921, ignoré pendant un siècle et retrouvé à Zurich consultable grâce à une traduction et une étude critique, met en évidence les erreurs d'estimation du plan Schlieffen, la présence de 25 000 Allemands, les retards d'approvisionnement en munitions, la perte de 25 à 30% des effectifs du VIIe CAR à l'issue de sa marche forcée le 13 septembre au matin sur le Chemin des Dames.L'édition de cette source, ignorée pendant un siècle, est complétée par des extraits des rapports des généraux von Bülow et von Kuhl sur le contexte militaire et deux articles de journaux mettant en avant la puissance de l'artillerie lourde. Il appartiendra au public de mesurer la réflexion de Jean Jaurès: " Dans les grandes plaines du Nord… qu'y-a-t-il pour répondre? Le seul camp retranché de Maubeuge, un îlot surnageant dans une grande nappe d'invasion! "…
Le château de Pierrefonds, restauré par l'architecte Viollet-le-Duc à la demande de Napoléon III, est l'un des chantiers les plus prestigieux de la seconde moitié du XIXe siècle. L'abondance des sources permet d'en relater l'histoire en décrivant les hommes du bâtiment, ceux de la pierre (tailleurs, bardeurs, appareilleurs, sculpteurs), du métal (serruriers, plombiers, couvreurs), du bois (charpentiers, menuisiers) et de la couleur (peintres).L'ouvrage s'attache également à définir la place de Viollet-le-Duc, son rôle, ses méthodes, ses rapports avec le commanditaire, avec les artisans et ses collaborateurs directs (inspecteurs, entrepreneurs, vérificateurs).L'objectif est donc d'analyser le processus de restauration dans ses choix pratiques comme dans ses orientations technologiques et d'apprécier comment la culture matérielle du chantier façonne la mémoire et l'identité collective d'un groupe.
Face à l'invasion allemande, le recteur Georges Lyon décide en 1914 de rester à la tête des structures scolaires et universitaires de la partie occupée de l'académie de Lille pour mieux les maintenir en vie. Il rédige pendant la guerre ses Souvenirs qui constituent un témoignage d'une grande richesse pour saisir la vie des habitants.Membre de l'élite culturelle, en lien avec les autorités d'occupation et avec les notables – dont le maire de Lille Charles Delesalle, l'évêque Monseigneur Charost, et de nombreux universitaires –, Georges Lyon décrit les exigences allemandes, la vie difficile des Lillois marquée par les pénuries et les réquisitions, voire les déportations. Il s'intéresse aussi aux rapports qui se nouent entre les occupants et les occupés, montrant certaines accommodations mais aussi l'importance du refus. L'ouvrage, outre une présentation des apports majeurs des Souvenirs, est constitué de la retranscription annotée des feuillets manuscrits de Georges Lyon.
Vivre et enseigner sous la menace, protéger les enfants, ne pas désespérer : rare témoignage direct et critique d'une institutrice piégée dans la " Zone interdite ", tenue d'une main de fer par les nazis, de Dunkerque à Arras, Bailleul et Hazebrouck.Peu de témoignages de civils au cœur de cette guerre nous sont parvenus. C'est dire combien sont précieux ces modestes cahiers d'écolier, transcrits par son fils et présentés par un historien de l'éducation. Ils nous offrent un portrait irremplaçable de cette période noire pour les habitants du Nord Pas-de-Calais. Denise Delmas tient en effet avec opiniâtreté une chronique des faits marquants vécus, au cœur de cette zone, avec son mari professeur et leurs deux jeunes enfants : de Dunkerque bombardée – quittée en mai 1940 – à Arras où elle reste bloquée avant de regagner la Flandre et de reprendre son métier à Bailleul puis à Hazebrouck sous les bombes.Ce sont tout autant les faits décrits que son regard sur eux qui méritent l'analyse : Quelles perceptions de la guerre et de ses étapes ? Quelles images du régime de Vichy et des combats lointains arrivent jusqu'à elle et quel " univers mental " se dévoile au fil des pages ?Intérêt supplémentaire, sa position propre n'est pas banale : attachée à la justice sociale et à la laïcité mais très croyante, attachée à l'Église mais très critique sur l'épiscopat et sur Vichy. La spécificité de sa position lui permet de mieux décrypter le cours des événements et de reprendre, peu à peu, malgré tout, espoir.
Cette nouvelle édition présente cinq journaux remarquables d'habitants du Nord, combattants et civils, rédigés entre 1914 et 1918 dans les tranchées et dans la région occupée. Ils restituent, cent ans après la Grande Guerre et la disparition complète d'une génération, des situations d'hommes et de femmes qui ont vécu la résolution, la souffrance, l'humiliation, en restant conscients du prix de leur abnégation : le sacrifice pour la France.Les diaristes pratiquent une forme de résistance de tous les instants, y compris tenir un journal : résister, c'est tout faire pour gagner la guerre contre les Allemands. Les soldats nous renseignent, à tous les niveaux spatio-temporels, sur les combats, l'occupation, l'évacuation, tandis que les diaristes civils, – deux institutrices et un commerçant –, se font les mémorialistes d'une précision implacable de leur région à l'heure allemande, enchevêtrée dans leur chronologie affective personnelle.La lecture de ces journaux nous apprend que le corps, l'âme, le paysage, sont vulnérables, au sens étymologique. Elle nous permet de voir comment les blessures et les dévastations extraordinaires dues à la Grande Guerre ont été vécues, perçues et représentées, " distillées ", comme disait le géographe écrivain Julien Gracq en inventant les belles notions " d'esprit de l'histoire " et de " paysage-histoire ".
Pierre Deffontaines, directeur de l'Institut français de Barcelone
Géographe, catholique engagé, Pierre Deffontaines est un fervent acteur de la politique culturelle de Pétain dans l'Espagne de Franco avant de rallier la France combattante. En 1943, il ouvre à Barcelone un Institut dissident fortement impliqué dans l'évacuation des évadés de France vers l'Afrique du Nord.Le journal dévoile le jeu complexe des rivalités entre Vichy et Alger pour s'emparer du principal réseau culturel resté en activité pendant la seconde guerre mondiale. Il éclaire notamment le rôle des Alliés et du régime franquiste dans l'institutionnalisation en Espagne d'une dissidence giraudiste, ralliée ensuite au CFLN.Sa publication met au jour une source inédite capitale pour appréhender une page méconnue dans l'histoire de l'action culturelle française sous Vichy. Précédé d'une présentation historique du réseau basée sur des fonds d'archives français et espagnols, ce livre éclaire les forces profondes qui, à Barcelone, ont présidé aux changements de cap du directeur de l'Institut, maréchaliste passé au gaullisme.En restituant le rythme et l'impact d'événements majeurs sur les individus, le journal de Pierre Deffontaines met la guerre à hauteur d'hommes. Suivre ses réflexions et ses doutes offre des clés pour saisir une époque qui ne peut se réduire à l'opposition définitive de deux camps homogènes.Ce livre ne s'adresse pas aux seuls spécialistes. La vivacité du récit et les questions qu'il soulève intéresseront un large public.
Ethnologue, premier japonologue en France, sinologue, mayaniste, spécialiste des religions orientales et épistémologue, Rosny est un découvreur, un véritable pionnier de ces sciences dans la seconde moitié du XIXe siècle.C'est également un travailleur infatigable, boulimique de connaissances et un " entreprenant " impénitent. Hors cursus classique, il se construit une remarquable éducation éclectique. Dès l'enfance, il manifeste une extraordinaire capacité d'assimilation, démontrée plus tard par sa maîtrise de plus d'une quinzaine de langues et de leurs civilisations.Chercheur et philologue, il sera aussi professeur, traducteur, interprète, journaliste, photographe, dessinateur, éditeur, imprimeur et… relieur.Admiré même s'il est controversé, reconnu au cœur d'un réseau international de savants, Rosny a toujours eu la passion de transmettre ses idées, ses savoirs et ceux de ses contemporains. Cent ans après sa mort, ce sont cet itinéraire rare et cette œuvre surprenante qu'il nous est donné de découvrir, mettre en perspective et approfondir.
Alors que les hommes mobilisés sont loin des leurs demeurés à l'arrière, le lien de la correspondance devient essentiel pour ces Femmes sur le pied de guerre de la famille Resal. Leurs lettres maintiennent le contact, pendant toute la Grande Guerre, entre les membres de cette famille d'ingénieurs proche de certains généraux et de l'entourage immédiat de Clemenceau.La correspondance polyphonique de ces quatre femmes circule, en un flux continu, vers les champs de bataille, de Charleroi au Chemin des Dames en passant par Verdun : Berthe, la grand-mère, est menacée de revivre en Seine-et-Marne l'occupation de 1870. Sa fille Julie organise un ouvroir et participe aux actions de la Croix-Rouge, quand son mari, directeur des tramways de Bordeaux, emploie des " femmes cochères ". Tout comme leurs deux filles - l'une infirmière, l'autre professeur de piano - elles adressent chaque jour à leur petit-fils, fils et frère des lettres qui, par l'ensemble qu'elles forment, présentent plusieurs angles de vue sur l'épreuve de la séparation, de l'angoisse et du deuil.Leurs écrits intimes, qui livrent la chronique quotidienne de la vie d'une famille de la bourgeoisie républicaine et l'écho de la vie nationale, révèlent aussi le patriotisme de leur milieu. Ces Femmes sur le pied de guerre offrent un condensé, sur trois générations, de leurs parcours entre 1914 et 1918, et présentent un tableau très éloigné du lieu commun de femmes qui seraient par nature éplorées et pacifistes.
Reflétant les débats de la communauté anglicane, William Temple nous invite à réfléchir sur la place de l'Eglise dans le débat social et politique. Education, revenu minimum, congés payés, liberté de parole, de rassemblement et de religion, et droit de regard des salariés sur la gestion de l'entreprise, toutes ces questions, sont actuellement au cœur du débat politique et pour certaines remises en cause. La lecture de l'ouvrage de William Temple, paru en 1942, conduit à nous interroger pour savoir si nous n'allons pas de nouveau manquer l'occasion de réorganiser la société de manière plus juste à l'occasion de la crise que nous traversons.