Construire la compétence lexicale : quelles avancées vers le réemploi aujourd'hui ?
La question de l'enseignement-apprentissage du lexique est au centre des préoccupations des chercheurs et des enseignants, du fait de son influence en compréhension ou des corrélations entre réussite scolaire et connaissances lexicales. Pour autant, la question du réemploi lexical, qui préoccupe largement les praticiens, reste sous-traitée. Ce numéro est l'occasion de faire le point sur l'actualité de la recherche dans ce domaine. Qu'il s'agisse de productions orales ou écrites, voire de l'utilisation d'outils informatiques, les auteurs s'attachent à proposer des pistes possibles pouvant favoriser les acquisitions lexicales et le réemploi, de l'école maternelle à l'université, en langue première, seconde ou étrangère. Les contributions s'organisent autour de trois volets. Le premier questionne la programmation en didactique du lexique en vue du réemploi. Le deuxième interroge l'empan sur lequel porte le réemploi lexical et les facteurs le suscitant. Enfin, et en vue de favoriser le réemploi, le troisième volet démontre l'intérêt de l'articulation entre l'enseignement-apprentissage d'unités lexicales et des activités orales, ainsi que des lectures littéraires et des productions écrites. Le numéro se clôt par une autre interrogation: celle de l'évaluation des connaissances lexicales et des tests mis en œuvre pour y parvenir.
Les dix articles rassemblés dans ce numéro de Repères traitent des effets des pratiques d'enseignement de l'orthographe à l'école et au collège. Ils illustrent les transformations actuelles de ces pratiques. Tout d'abord, ils témoignent d'un recours plus marqué aujourd'hui à la collaboration entre élèves. Ils sont aussi le reflet d'un déplacement d'une tradition de mémorisation et d'application à une exigence de raisonnement et de compréhension du système linguistique, dans la lignée des travaux portant sur les ateliers de négociation graphique. Ils reflètent par ailleurs l'intégration progressive du numérique à l'enseignement-apprentissage de l'orthographe. Enfin, ces évolutions nécessitent la maitrise de compétences de la part des enseignants que la formation devrait mieux prendre en charge, par exemple avoir des connaissances solides du fonctionnement du système d'écriture ou développer sa capacité à comprendre les raisonnements des élèves et à les faire évoluer.
La lecture et l'écriture littéraires à l'école à l'aide de l'album jeunesse : quelle progression?
Ce numéro thématique s'intéresse à la question de la progression, de la petite enfance à l'adolescence. Il permet d'apporter un éclairage sur le concept de progression dans le domaine de l'écriture et de la lecture littéraire à l'aide de l'album jeunesse, et ce, en distinguant deux perspectives. La première, didactique, concerne l'ordre de présentation des contenus et la programmation des activités et s'intéresse aux pratiques des enseignants et à la façon dont ils planifient la progression des apprentissages et la mettent en œuvre dans leur classe. La seconde, développementale, concerne le rythme et la séquence de développement des habiletés de l'apprenant et se penche sur les pratiques effectives des élèves et sur leurs savoirs en construction lorsqu'ils discutent autour des albums ou qu'ils utilisent des procédés littéraires, tirés de ces albums, dans leurs propres écrits. Si plusieurs articles abordent l'une ou l'autre des perspectives, il ressort des contributions une forte articulation entre les deux types de progressions, le développement effectif de l'élève conduisant à réfléchir sur les progressions établies par les programmes ou les enseignants. Le numéro permet ainsi de poser la thématique de la progression en l'articulant aux trois grands pôles didactiques: progression d'un contenu dans un programme ou une séquence; progression établie par un enseignant dans une séquence ou une activité; progression d'un élève dans l'appropriation et la maitrise des contenus.
Le tournant éthique en didactique de la littérature
En 2015, les programmes d'enseignements français pour les cycles 3 et 4 assignent à l'enseignement de la littérature des enjeux littéraires et de formation personnelle. Parallèlement, les programmes d'enseignement moral et civique (en France) ou d'éthique et culture religieuse (au Québec) confèrent aux œuvres littéraires la possibilité de développer la pensée critique des élèves, leur responsabilité civique et leur réflexivité, sur les plans personnel et social. Ce numéro de Repères interroge cette évolution notable de la prescription institutionnelle relative aux enjeux éthiques de l'enseignement de la littérature et contribue à mieux en cerner les implications dans différents pays francophones, au primaire et au secondaire. Le " tournant éthique " en études littéraires, déjà ancien, jouit-il d'une réception renouvelée en didactique de la littérature? Que signifie enseigner la littérature dans une intention éthique aujourd'hui? Comment éviter l'utilisation moralisante, voire moralisatrice, de la littérature à l'école? Comment articuler les valeurs analysables dans les œuvres, portées par chaque lecteur, (dé)construites dans les interactions en classe et prescrites par l'institution scolaire? Qu'est-ce qui se dit et se tait, s'observe et se dissimule quand il s'agit d'éthique en classe de littérature? Les auteurs abordent ces questions essentielles selon des perspectives épistémologiques, théoriques et praxéologiques croisées.
Dans la structuration ordinaire du travail à l'école, l'exercice est central, si l'on entend par là une démarche didactique qui porte sur un savoir ou un savoir-faire identifié, fondée sur des supports divers (souvent textuels) qui sont l'objet d'activités précises, matérielles et cognitives, des élèves. Qu'il concerne la découverte, l'approfondissement ou l'évaluation de contenus d'enseignement, l'exercice semble inhérent à la pratique didactique, ce qui en fait un objet récurrent des discours ordinaires sur l'école. Il existe pourtant relativement peu de travaux sur la question dans le champ de la didactique du français, sans doute du fait d'une tradition critique de la didactique à l'égard de l'exercice, mais aussi parce que d'autres termes, dans les discours didactiques, lui ont été substitués. Pourtant, l'absence d'une appréhension théorique systématique de l'exercice n'empêche pas que ce dernier résiste et perdure dans les pratiques, tant dans les représentations et les discours des différents acteurs de l'école que dans les manuels et dans les classes.Ce numéro de Repères veut contribuer à mieux cerner ce qu'on entend par exercice dans la classe de français, au primaire et au collège. Plus précisément, il s'agit d'identifier quelle peut être l'approche didactique de l'exercice, qui ne saurait être traité indépendamment des contenus en jeu. Deux sections organisent ce numéro: la première envisage l'exercice du côté des pratiques de classes ou du discours sur ces pratiques; la deuxième section s'intéresse aux exercices dans les moyens d'enseignement – qui désignent ici non seulement les manuels scolaires mais aussi d'autres supports pédagogiques et de préparation de cours, y compris numériques.Si l'on peut observer une grande diversité des contributions à ce numéro de Repères – qui peut s'expliquer par le fait que les exercices qui font l'objet des articles sont, à quelques exceptions près, traités isolément – le projet même de ce numéro, par la confrontation des exercices qu'il permet, autorise une forme de mise en relation, salutaire si l'on pense qu'il y a une certaine perte à décrire un exercice isolément des exercices connexes. Mais ce qui ressort le plus nettement de cette mise au travail de la notion d'exercice est l'intérêt qu'il y a à ne pas laisser dans un impensé didactique ce qui relève de l'ordinaire de la classe.
L'histoire récente de l'enseignement de l'oral et des recherches en didactique du français montre une alternance de périodes d'éclipse puis de regain d'intérêt. Le présent numéro témoigne cependant du fait que l'enseignement de l'oral est en train de s'implanter durablement dans le paysage de la didactique du français. Dans cette perspective, sont présentés ici plusieurs champs d'étude qui dessinent les contours actuels de la didactique de l'oral et analysent différents aspects des pratiques observées. Le numéro s'organise autour de trois entrées principales: est d'abord interrogé le double statut de l'oral à l'école, à la fois outil et objet d'enseignement; la question de l'autonomie de l'oral et de son enseignement constitue le deuxième axe de réflexion. Peut-on par exemple programmer des activités explicites visant à mieux maitriser des activités discursives telles que la justification, ou encore liées à la proxémie, comme la direction du regard et la maitrise du volume de la voix? Enfin, une troisième perspective, plus récente, s'attache à la dialectique qui s'établit, dans le contexte scolaire, entre oral travaillé (en fonction des besoins disciplinaires), et oral enseigné (en fonction des besoins repérés). Un des enjeux majeurs du renouveau d'une didactique de l'oral est de contribuer à l'amélioration de la formation des enseignants, en leur permettant d'acquérir une expertise à la fois langagière, pour guider et étayer les échanges, et didactique pour programmer et construire des séquences d'enseignement au cours desquelles l'oral est enseigné explicitement.
Le décrochage scolaire touche des milliers de jeunes et les plans de lutte contre ce phénomène se sont multipliés en France ces dernières années. De nombreuses études lui ont été consacrées, essentiellement en psychologie ou en sociologie, en étudiant les interactions entre le sujet, son milieu et l'école, celle-ci étant envisagée de manière très globale. Les questions portant sur le climat scolaire, l'estime de soi des élèves, le sens qu'ils n'arrivent pas à attribuer aux apprentissages sont largement traitées. Mais la part des enseignements disciplinaires qui occupent pourtant la majeure partie du temps scolaire est quasiment occultée.Ce numéro de Repères est donc novateur en ce qu'il tente de combler ce manque en appréhendant le décrochage dans une perspective didactique, c'est-à dire en se focalisant sur les disciplines scolaires, principalement sur la discipline français. Il propose donc un ensemble d'articles qui analysent l'intérêt des recherches didactiques et de la prise en compte des disciplines scolaires pour préciser les mécanismes du décrochage. Ils exposent des recherches portant sur les relations entre les manières dont les élèves vivent les disciplines et le décrochage, analysant des entretiens avec des élèves décrocheurs et raccrocheurs en collège et en lycée et des dispositifs concernant des élèves allophones nouvellement arrivés. D'autres articles soumettent des expériences portant soit sur la prévention du décrochage en REP au travers de pratiques d'enseignement de l'écrit, soit sur l'enseignement de la littérature. La question particulière du raccrochage scolaire est abordée dans le cadre de pratiques d'écriture dans le microlycée de Paris.
Partant du constat que l'enseignement-apprentissage de la lecture est, à bien des égards, un permanent voyage dans l'espace et dans le temps, ce numéro s'intéresse à la fois à la situation des élèves lecteurs dans leurs premières années d'apprentissage, aux enjeux des pratiques de leurs enseignants et au travail des didacticiens qui cherchent à mieux comprendre et guider l'activité des uns et des autres. L'attention se porte ainsi tour à tour sur la façon dont les modalités lectorales des élèves varient selon les contextes – scolaires ou extrascolaires – et les âges (M. Brunel et J.-L. Dufays); sur la réception des stéréotypes genrés des albums de littérature de jeunesse dans les espaces contrastés du musée et de l'école (A. Dias-Chiaruttini); sur la manière dont un enseignant organise les différents temps du roman au sein d'une séance de littérature " ordinaire " (Br. Louichon); sur l'activité d'une professeure de CP lorsqu'elle enseigne la lecture et l'écriture à partir de textes littéraires (M. Fradet-Hannoyer); sur les étapes par lesquelles des enseignants débutants deviennent des professionnels de l'enseignement de la lecture (S. Briquet-Duhazé); sur un dispositif qui vise à favoriser l'appropriation et la mémorisation des lectures par les élèves (A. Perrin-Doucey et S. Warnet); sur la mise en œuvre progressive d'un apprentissage explicite de la compréhension à partir d'albums de jeunesse (P. Dupont); et sur la manière dont les émotions fictionnelles permettent à l'élève-lecteur d'éprouver corporellement le point de vue du personnage (V. Larrivé).
L'étude de la langue : des curricula aux pratiques observées
Ce numéro sera principalement alimenté par les contributions au colloque de Toulouse en 2010 intitulé " Grammaire en francophonie. Curricula, manuels, pratiques d'enseignement observées, formation des enseignants ", dont les actes n'ont pas été soumis à éditeurs, en raison des soubresauts successifs de la formation des enseignants, dans la période. La relecture de ces contributions a permis de constater qu'elles conservent toute leur actualité.
Aujourd'hui, la littérature de jeunesse est présente dans les classes. Les usages didactiques en sont variés. Ce numéro s'intéresse particulièrement à celui des fictions – roman, album, théâtre – historiques.Sans être vrai, ce qui est raconté y est vraisemblable, historiquement vraisemblable mais c'est par le recours à la fois à des éléments fictionnels et à des stratégies discursives propres aux genres ou langages narratifs que la fiction historique fonctionne. L'hybridité (vérité des éléments historiques et fiction du récit englobant) est consubstantielle du genre.Ce numéro de Repères s'organise en deux ensembles. Le premier soulève, entre autres, la question de l'outil et de son choix dans un contexte de publications exponentielles d'ouvrages relevant de ce genre. Quelle fiction choisir? Comment choisir? L'analyse porte sur quelques-unes des caractéristiques des fictions proposées à la jeunesse en centrant l'approche sur une collection ou une thématique (par exemple la Shoah). Il s'attache aussi à mettre en évidence les difficultés que posent ces corpus au jeune lecteur mais aussi aux enseignants, en termes de choix, d'enjeux et de finalités.Le second ensemble porte sur les pratiques de classe. L'étude des usages des fictions historiques permet de questionner à nouveaux frais la question de la disciplinarité et de l'interdisciplinarité. La fiction historique, objet littéraire hybride et paradoxal, objet éditorial composite ou hétérogène est aussi du point de vue didactique un objet qui interroge les découpages disciplinaires.
Vingt ans de recherches en didactique du français (1990-2010). Quelques aspects des recherches dans les revues
À l'occasion du vingtième anniversaire de la nouvelle collection de Repères, le comité de rédaction de la revue a jugé pertinent d'interroger vingt ans de recherches en didactique du français (1990-2010) telles qu'elles apparaissent dans les revues du champ, sans évidemment s'en tenir à Repères.Revenir sur ces vingt dernières années n'est pas le fait d'une nostalgie, comme s'il fallait rêver d'un passé révolu. Mais il est de la responsabilité des didacticiens d'interroger leur champ de recherche et de faire le point sur ce qui a permis d'en assurer les fonde-ments théoriques, mais aussi sur les éléments de fragilité qui risquent d'en obérer l'avenir.Ce numéro vise à faire le point sur les recherches effectuées en didactique du français dans les vingt ans écoulés (sous forme de bilan rétrospectifs), en s'appuyant sur une analyse effective des corpus que constituent les revues de didactique du français. Le choix de privilégier les revues pour ce regard rétrospectif s'explique par le rôle important qu'elles jouent dans tout champ de recherche : pour la didactique du français, on peut même dire que son histoire recoupe en partie celle de ses périodiques.Les contributions de ce numéro analysent l'évolution des objets didactiques et de leurs formes de traitement dans les recherches publiées. Pour riche qu'il soit, il ne rend cependant compte que de ce que les chercheurs qui ont voulu y contribuer ont proposé – c'est le sens du sous-titre que nous lui avons donné : " Quelques aspects des recherches dans les publications ".La variété des approches, qui fait la richesse de ce numéro tout en faisant ressortir celle du champ de recherche, permet en même temps de donner des pistes de travail théorique sur tel ou tel aspect négligé dans certaines études.
Oeuvres, textes, documents : lire pour apprendre et comprendre à l'école et au collège
Une mission prioritaire de l'école est de donner à tous les élèves les moyens d'accéder à une culture commune où les connaissances et démarches intellectuelles nécessaires à l'intégration passent par les médiations écrites et supposent d'en maitriser les usages. Elle doit pour cela admettre la pluralité des rapports à la lecture et des raisons de lire, et donner toute sa place à la lecture pour agir et apprendre. Cette visée épistémique sous-tend la lecture de documents, mais est aussi une dimension de la lecture de fiction qu'on ne peut minimiser.Les pratiques de lecture dites fonctionnelles ne se réduisent ni à l'usage utilitaire d'écrits pratiques, ni au repérage d'informations. Comprendre des documents, construire et utiliser des connaissances à partir de cette lecture mettent en jeu un véritable engage-ment et des processus d'interprétation que les évolutions récentes, tant sur Internet que dans l'édition, rendent plus complexes : multiplicité et hétérogénéité des écrits, multimodalité, tâches scolaires exigeant la confrontation de sources différentes. Pour ajuster supports et tâches, il faut mieux comprendre les démarches et les difficultés des élèves dans ces situations et clarifier ce que suppose l'usage de documents dans les apprentissages.Ce numéro vise à faire le point sur ces évolutions, à en cerner les enjeux et les obstacles, et à dégager les axes de travail pour que les activités de lecture puissent donner à tous les élèves des moyens de développer des connaissances et une réflexion sur le monde.