Les rapports de sexe sont-ils solubles dans le genre ?
Les rapports de sexe sont-ils solubles dans le genre ?Dossier présenté par Annie Benveniste et Adelina MirandaCe dossier se propose de faire un retour sur la connaissance anthropologique et l'usage qu'elle fait, dans les études féministes, des concepts de sexe et de genre. Si le " genre " a contribué à poser la question de la construction de la différence des sexes sous un nouvel angle, en étant attentif à la façon dont les frontières entre sexe et genre sont flexibles, il est de plus en plus utilisé comme variable pour mesurer les écarts entre les femmes, considérées comme représentantes de la permanence de cultures spécifiques et localisées. La banalisation de la notion et le risque d'essentialisme qu'elle entraîne sont interrogés dans un premier ensemble d'articles critiques. La conception du genre comme construction culturelle de la différence sexuée doit être dépassée ; les performances de genre soumises à la critique féministe de la hiérarchisation des sexes. Le deuxième ensemble d'articles abordent les rapports sexe/genre sous l'angle de la division sexuelle du travail en intégrant les contributions des premières études féministes en anthropologie. Le troisième ensemble d'articles porte sur la réflexivité et interroge la proximité sexuée de l'ethnologue avec ses sujets et le processus d'altérisation qu'il-elle peut construire en tant qu'homme ou femme.
L'histoire urbaine de Jérusalem aux XIXe et XXe siècles, ensevelie sous les mémoires concurrentes, a fini par s'effacer derrière les conflits symboliques et nationalistes. Pour rompre avec une vision étroitement communautariste et géostratégique de la Ville sainte, pour en faire rejaillir la dimension profane et quotidienne sans perdre de vue l'agencement de ses territoires, de ses monuments, de son relief et de ses citadins, Vincent Lemire a choisi de faire l'histoire de la ville au prisme de la question de l'eau. Perchée à plus de 700 mètres d'altitude, Jérusalem manque cruellement d'eau potable, surtout entre les années 1840, moment du décollage démographique, et l'inauguration en 1936 de la monumentale canalisation de Ras el-Aïn. La " soif de Jérusalem " devient dès lors un enjeu majeur de l'action publique, qu'elle soit portée par les autorités civiles et religieuses de la ville ou par les puissances internationales qui s'en disputent le contrôle.L'histoire de cette longue quête hydraulique, dominée tour à tour par les archéologues et les philanthropes occidentaux, puis par les autorités impériales ottomanes et les édiles municipaux et enfin par les porte-drapeaux du projet sioniste et du nationalisme palestinien, s'appuie sur l'analyse de sources très diverses et largement inédites : archives de la municipalité ottomane et mandataire de Jérusalem, archives de l'administration des waqf, archives impériales d'Istanbul, archives consulaires et diplomatiques de Londres, Nantes et Paris, archives du mouvement sioniste à Jérusalem, collections privées. Cette étude pionnière montre que la question hydraulique est un passionnant observatoire pour l'histoire urbaine et dessine les contours d'une nouvelle méthode historique, l'hydrohistoire, particulièrement efficace pour comprendre des lieux saturés de sens comme la ville de Jérusalem.Vincent Lemire, ancien élève de l'École normale supérieure de Fontenay-Saint-Cloud, est maître de conférences en histoire contemporaine à l'université Paris-Est Marne-la-Vallée et membre du laboratoire " Analyse comparée des pouvoirs " (EA 3350). Ses recherches actuelles portent sur Jérusalem et le Proche-Orient contemporain, l'histoire environnementale et la patrimonialisation urbaine.
Toute fondation de lieu de culte suit un double processus : construction physique et matérielle d'un monument localisé et daté, et élaboration d'une tradition, d'un récit canonique autour du monument ou du personnage auquel il est dédié. C'est dans le décalage entre faits historiques et récit mythique ou légendaire, temps de l'histoire et temps du mythe ou de la légende qu'on saisira les enjeux de la fondation d'un tel lieu. D'où l'intérêt de combiner approche historique et approche anthropologique, méthode qui caractérise l'ensemble des contributions. Celles-ci explorent les différentes manières de bâtir un territoire sacré dans des situations de contact entre religions, mais aussi entre différentes formes ou différents courants d'une même religion.
Dans les sociétés civiles des nations concernées, on assiste à une recomposition des affiliations tribales au sein de réseaux financiers, commerciaux, mutualistes et autres. Étudiant le vote tribal, les analystes constatent que les tribus font et défont les positions politiques. En appeler au tribalisme pour le condamner renouvelle les représentations d'un monde tribal qui s'oppose à l'État, à la modernité. Les stratégies de la mondialisation renouent avec " le grand jeu tribal " des empires coloniaux, source de conflits violents et fortement médiatisés, de la Somalie et du Soudan à l'Afghanistan et au Pakistan... Jusqu'à présent, pour construire leur modèle, les sciences sociales n'ont retenu qu'un trait exclusif de la tribu : le développement des rapports de parenté en fonction de la filiation unilinéaire. Les recherches de terrain présentées ici invitent à une relecture critique de " la tribu des anthropologues ". Elles soulignent la permanence de valeurs relevant non seulement de pratiques communautaires mais aussi du genre, de la compétition et de l'honneur, valeurs qui commandent les comportements tribalistes et qui s'observent aussi bien là où la tribu voit son rôle décliner que là où elle n'existe pas même institutionnellement.
1998 fut l'année de la commémoration du cinquantenaire de la Nakba, la " catastrophe " qui, en 1948, a engendré la perte de la terre et l'exil des Palestiniens. Cette commémoration s'est déroulée dans un contexte social et politique en pleine restructuration, du fait de la mise en place de l'Autorité palestinienne dans la perspective de la création d'un Etat. Issu d'une enquête de terrain interrogeant à la fois la mémoire de réfugiés, les activités et discours officiels et la façon dont les institutions étatiques se mettent en place, cet ouvrage analyse les différents processus de reconfiguration de la mémoire collective et de l'identité nationale. Ce faisant, il met au jour les stratégies et les aspirations des uns et des autres, dévoilant par là les rapports de force et les enjeux de pouvoir entre ces différents acteurs qui luttent pour proposer une nouvelle version légitime de la mémoire palestinienne. A travers cette recherche, l'auteure montre comment la mémoire palestinienne a toujours été fortement configurée par ses usages politiques liés à la construction de l'identité nationale et aux revendications du peuple. Néanmoins, son instrumentalisation dans le cadre de la construction étatique risque de lui faire perdre son rôle unificateur et mobilisateur, de ciment de la communauté imaginée, cette mémoire devient progressivement l'alibi de politiques qui compartimentent la société. Elle n'est de ce fait plus capable d'exprimer l'identité collective ou les aspirations du peuple peuple palestinien. Cet ouvrage, par une analyse approfondie des discours mémoriels mis en relation avec l'actualité politique, donne une clé de compréhension des enjeux essentiels qui se sont joués entre d'une part les Palestiniens et les Israéliens au sujet de l'histoire, et d'autre part entre Autorité palestinienne et réfugiés, par rapport à leurs aspirations d'avenir respectives et à la manière de concevoir un éventuel Etat palestinien. L'auteure a enquêté, durant l'année de la commémoration de l'année du cinquantenaire de la catastrophe de 1948, sur la façon dont différents groupes d'acteurs produisent un discours officiel ou privé sur la mémoire palestinienne. L'analyse de ces récits montre que cette mémoire est fortement configurée par ses usages politiques liés à la construction de l'identité nationale et aux revendications du peuple et de l'Autorité palestinienne dans le cadre du processus d'Oslo.
Dégagé du poncif anthropologique de sa ritualisation festive, ce livre interroge l'omniprésence des usages du henné comme marquage corporel (technique tégumentaire) et comme pratique symbolique (diversité des utilisations). Ainsi l'usage de teindre les animaux domestiques au henné, d'utiliser le mime des cérémonies du henné, ou encore les évolutions contemporaines que connaissent ces différents usages, envisagés comme indicateurs des changements, son rôle comme lien entre culture matérielle en dimensions sociale, rituelle, symbolique et esthétique ou comme support dans le cadre des rites d'expulsion du mal et enfin en tant que pratiques corporelles vers une nouvelle forme de tourisme.Tourisme qu'illustrent ces messages publicitaires des magazines de mode qui déploient un discours récurrent sur les usages du henné. Le propos sous-jacent fait appel à nombre de représentations où l'engouement pour le henné rappelle certains des récits orientalistes du 19e siècle. Le henné est avant tout caractérisé comme un "produit exotique" associé à une forme de sensualité, d'imaginaire de l'ailleurs et de rêveries lointaines...Cet ouvrage propose d'aborder les éléments de cette diversité.
Un observatoire des tensions de la société palestinienneLes pèlerins qui se rendent aux sanctuaires de Moïse et de Sâlih sont principalement guidés par le désir de se retrouver entre Palestiniens. Les deux lieux saints se transforment en symboles d'une Palestine retrouvée et rassemblée.Mais, dans le même temps, ils constituent un parfait observatoire des tensions qui traversent la société palestinienne de ces années charnières : tensions entre religieux et politique ; familles et nation ; hommes et femmes ; mémoire héroïque et mémoire blessée du vaincu ; " vieille " Palestine et Palestine des accords d'Oslo ; tradition et modernité. De ces tensions, découle une atmosphère de grande anarchie qui contraste avec le désir de communauté énoncé par l'ensemble des acteurs.L'auteur – anthropologue – explore ces fractures, tout en essayant de comprendre l'instance de régulation qui produit de la cohérence là où ne semble régner que contradictions. Les relations entre religion et politiqueL'enquête s'est déroulée dans le cadre de la Palestine des années 1998-2003. Le déclenchement de l'Intifada al-Aqsâ en septembre 2000 a contraint Emma Aubin-Boltanski à modifier son approche méthodologique et théorique. Jusque-là, ce travail portait sur l'instrumentalisation d'un rituel religieux par les représentants du pouvoir politique. Le déclenchement de la guerre, et la phase de " déconstruction nationale " qui s'ensuivit, révélèrent la dimension religieuse de ces fêtes, alors peu visible, mais essentielle pour la survie du rituel. Le résultat de cette enquête en deux étapes est une meilleure compréhension de la façon dont se construisent, à travers certaines médiations cultuelles, les relations entre religion et politique.Un récit vivantAu cours de son exploration, de ses rencontres dans les lieux saints, l'auteur a perdu son statut d'observatrice extérieure, pour gagner un statut intermédiaire. C'est avec un regard quasi du dedans qu'est saisi le pèlerinage et à travers lui la société palestinienne. Les photographies qu'elle a prises illustrent à la fois le propos de son enquête, et ce regard particulier.
Théories et pratiques en géographie physique. Hommage au professeur Alain Godard/From Continent to Catchment. Theories and Practices in Physical Geography. A Tribute to Professor Alain Godard
70 collègues, français et allemands, australiens, britanniques, polonais, portugais, québécois, scandinaves ont contribué à la réalisation de l'ouvrage en hommage au professeur Alain Godard. Les contributions s'articulent autour de trois thèmes scientifiques représentatifs de l'itinéraire d'Alain Godard : les socles cristallins, les domaines froids, les bilans d'érosion et rythmes d'évolution.
Organisation et transformation d'une communauté de pêcheurs de la côte de l'océan Indien
Le Yémen possède 2250 km de côtes sur lesquelles vivent plus de 20 000 pêcheurs et leurs familles. Cet ouvrage décrit les activités et la vie quotidienne de ces communautés, longtemps restées à la marge de la société, en se fondant sur un travail d'observation effectué dans le Hadramaout, sur la côte de l'océan Indien.En retraçant leur histoire, l'auteur décrit l'apprentissage, les savoir-faire, lastructure hiérarchique, les techniques de pêche, les circuits économiqueslocaux ainsi que les connaissances spécifiques détenues par les pêcheurs. Elle nous montre aussi comment ces groupes s'insèrent dans une société globale, revendiquant à la fois une spécificité singulière et une volonté de changement.
Au sommaire : B. Botiveau et É. Conte, "Introduction" ; R. Heacock, "Saisir l'initiative, retrouver sa voix. L'intifâda d'al-Aqsa ou la révolte des marginalisés" ; C. Pirinoli, "Effacer la Palestine pour construire Israël. Transformation du paysage et enracinement des identités nationales" ; A. Signoles, "Gestion des espaces et contrôle politique. Israël au cœur du processus décisionnel local (1998-2000)" ; C. Barrat, "Le mur. Analyse d'une décision de la Cour internationale de justice" ; É. Conte, "L'autre mur. Mariages bannis et citoyennetés fragmentées en Israël-Palestine" ; N. Shehada, "Les paradoxes du mariage précoce à Gaza" ; E. Meier, "Alliances et exclusions au Liban. Les mariages libano-palestiniens" ; M. al-Malki, "Surmonter l'intifâda d'al-Aqsa. Entraide sociale et clientélisme en Palestine" ; M. Maalouf-Monneau, "Pouvoir local et droit à la résidence : l'exemple de la Maison de l'Orient à Jérusalem" ; C. Abu-Sada, "Urgence et développement. L'action des ONG pendant la seconde intifâda" ; V. Romani, "Quelques réflexions à propos des processus coercitifs dans les Territoires occupés" ; B. Botiveau, "Des accords d'Oslo à la seconde intifâda. L'espace public palestinien en question".
L'approche sociologique de l'immigration distingue la problématique de l'immigration (causes, politiques des États d'origine et de destination, déplacement) de celle de l'installation (intégration : acculturation, acquisition d'une place sociale, économique et politique dans le pays d'accueil). Combinant les deux problématiques, l'ouvrage a aussi une approche politique, historique, géographique et anthropologique, éclairée par des recours constants au pays d'origine et à son histoire. Un travail bibliographique et statistique détaillés permet de dépasser les limites de l'Aquitaine pour une comparaison avec des migrants portugais et maghrébins et des Turcs d'Allemagne.