suivi de : À quoi servent les patrons ? Origines et fonctions de la hiérarchie dans la production capitaliste de Stephen Marglin
Il peut sembler aujourd'hui quelque peu déplacé de se demander – comme le faisait Stephen Marglin au début des années 1970 – mais au juste, à quoi servent les patrons ? Pourquoi, dans les entreprises, le travail est-il divisé entre certains individus spécialisés dans la décision et le commandement, et d'autres qui le sont dans l'exécution ?Cette interrogation fleure le gauchisme de jadis. Pour cette raison, certains la jugeront grossière. Pourtant, celui qui cherche à y répondre sera étonné du manque de matériaux proposés par les économistes. Il a fallu attendre le milieu des années 1970 pour que survienne une véritable explosion du nombre des publications portant sur la " théorie de l'entreprise ". Malgré ce déferlement, le lecteur reste un peu sur sa faim. En effet, dans la quasi-totalité de ces publications, l'utilité d'une hiérarchie autoritaire, réglant les rapports de subordination dans l'entreprise, est en réalité un postulat de départ. Pour cette raison, la question posée par Marglin dans un texte fameux, voilà plus de trente ans, reste toujours d'actualité.Le présent ouvrage comporte une traduction complète de ce texte, lequel est tout d'abord analysé et resitué dans son contexte intellectuel et social, celui du développement de l'économie politique radicale.
Roman noir, parabole de la capitulation des intellectuels face à la montée du nazisme, Auto-da-fé de Canetti est aussi une transposition magistrale de Don Quichotte. L'analogie entre les deux romans est si patente qu'elle n'a pas manqué d'être relevée par la critique, mais elle n'avait fait l'objet d'aucune étude approfondie jusqu'à ce jour. Au moyen d'une analyse comparative précise, Christine Meyer parvient à éclairer les enjeux multiples, à la fois esthétiques et philosophiques, de la transformation intertextuelle chez Canetti.
L'idéologie de l'éducation en question : conjonctures critiques et expérimentations à l'époque moderne et contemporaine
La phrase " il faut éduquer les enfants… " sonne simultanément comme une évidence, une injonction et un idéal. Il semble évident d'adhérer à ce qui semble même un invariant anthropologique. Le présent ouvrage propose pourtant une autre perspective grâce à des études philosophiques et historiques s'appuyant sur deux grandes périodes : un long xixe siècle tourmenté par la révolution et l'émancipation, qui génère la figure centrale de l'école, et un xxe siècle travaillé par l'extrême violence et l'inquiétude sur l'humain.Portant sur des expérimentations théoriques et pratiques, révélant les contradictions ou les failles des appareils éducatifs, l'ouvrage engage une démarche philosophique critique sur " l'idéologie de l'éducation " qui commande, depuis deux ou trois siècles au moins, nos façons d'apprendre, de socialiser, d'aider à grandir et de former les petits d'humains dans des institutions déterminées (la famille et l'école avant tout) et suivant des représentations et des catégories précises (la catégorie d'enfance, en premier lieu). C'est cette " idéologie de l'éducation " qu'il s'agit ici d'étudier, de problématiser et d'interroger.
Des guerres de religion à la Fronde, la France connaît une période d'instabilité politique et religieuse propice à toutes les licences. C'est dans ce cadre mouvant, en perpétuelle redéfinition, que prennent place un certain nombre d'imprimés remarqués pour leur virulence ou leur portée transgressive. La liberté de parole relève d'un geste libératoire, comme l'attestent les réactions des institutions ou des ordres interpellés. Cet excès, tant idéologique que verbal, doit être mesuré à l'aune de la réglementation progressive des savoirs, des normes morales et des pratiques censoriales qui les défendent. Des espaces éditoriaux à ceux, bien réels, des institutions, se joue aussi l'affirmation de la persona auctoriale, mise en scène et mise en cause par l'imprimé subversif – fable, dialogue philosophique ou invective pamphlétaire. Qu'est-ce que la liberté de parole ? Les communications réunies dans le présent ouvrage ont en commun d'articuler les enjeux idéologiques de la liberté à une approche pragmatique des actes de langage. Au terme d'un tel parcours, il est possible de dire ce qui informe les limites du dicible et du publiable à un moment donné : comment et pourquoi certains auteurs, plutôt que d'autres, furent condamnés pour avoir voulu " parler librement ".
Littérature, anthropologie et histoire culturelle. Mélanges offerts à Nicole Jacques-Lefèvre.
" Raconter d'autres partages ": c'est ainsi que Michel Foucault invitait naguère à " braquer le projecteur " sur les " silences de l'Histoire ". C'est bien de cette " histoire des limites " que relève le travail de Nicole Jacques-Lefèvre, figure majeure de l'enseignement et de la recherche littéraires à l'ENS Fontenay-Saint-Cloud, dont les travaux ont toujours exploré des discours situés à la lisière des systèmes dominants de leur époque, à l'intersection de la littérature, des savoirs et des croyances. Réunissant des contributions signées de ses anciens élèves, ce volume souhaite témoigner du rayonnement de son enseignement et de la valeur séminale de ses travaux, de son approche réellement interdisciplinaire des textes et de son intérêt pour les marges incertaines et les frontières indécises. Volume d'hommage, le présent livre donne aussi l'image dynamique d'un courant actuel des études littéraires qui définit ses champs de recherches au contact de l'anthropologie et de l'histoire culturelle.
suivi de : "L'invasion de la philosophie et de l'économie par l'herméneutique" de Murray Rothbard
Lors d'une conférence prononcée à Cracovie en 1987, Murray Rothbard dénonce avec virulence l'" invasion " de la pensée herméneutique dans la philosophie et les sciences économiques nord-américaines. Représentant éminent de l'École autrichienne aux États-Unis, il entend préserver la pureté et l'efficience du dogme libéral en affichant son extrémisme. Ses ennemis sont multiples : si l'herméneutique est principalement visée (elle introduirait un relativisme niant toute scientificité), toute conception alternative au libéralisme " puriste " est également condamnée, en premier lieu celle de l'École de Chicago dont l'hérésie a consisté à fonder le libéralisme sur une base positiviste et finalement constructiviste, préparant ainsi le terrain aux herméneutes. La présente étude met au jour les présupposés philosophiques, épistémologiques et méthodologiques à l'origine des querelles internes au libéralisme dans la seconde moitié du xxe siècle, et entend donner au lecteur les moyens de s'orienter dans des problématiques encore peu connues pour certaines, mais dont les effets sont pourtant déjà sensibles dans les politiques économiques. Le texte de cette conférence, " L'invasion de la philosophie et de l'économie par l'herméneutique ", est proposé pour la première fois en traduction française dans cet ouvrage. Ancien élève de l'ENS (Ulm) et des universités de Harvard et de Tokyo, Gilles Campagnolo est chargé de recherches au CNRS (CEPERC, Aix-en-Provence).
suivi de : "La rhétorique des sciences économiques" de Deirdre N. McCloskey
En 1983, paraît dans le très sérieux Journal of Economic Literature un article au ton pour le moins iconoclaste. Signé par un auteur jusqu'alors reconnu pour ses travaux classiques dans le domaine de l'histoire économique quantitative, ce papier traite de la rhétorique des économistes. D. N. McCloskey y assène, entre autres, que l'étude des textes économiques relève avant tout de la critique littéraire ; que les modèles mathématiques, tant prisés par les économistes, sont essentiellement métaphoriques et composent un véritable domaine poétique original ; que l'économiste de profession est, au minimum, en retard d'une révolution épistémologique par rapport à ses contemporains lorsqu'il prétend assurer son autorité scientifique sur sa capacité réelle à faire des prédictions. Un fort courant de réflexion sur la rhétorique des sciences économiques va prendre sa source dans cette bravade contre le positivisme et le scientisme ambiants. En précisant le point de départ de McCloskey, en consolidant les intuitions fécondes contenues dans son attaque en règle contre le " modernisme ", en prenant parfois leurs distances vis-à-vis des aspects trop clinquants de son manifeste de 1983, quelques auteurs – dont notamment Roy Weintraub, Robert Heilbroner, Albert Hirschman – vont explorer alors plus avant les conséquences de la révolution rhétoricienne en économie. " La rhétorique des sciences économiques " est proposé ici pour la première fois en traduction française.
Robert L. Heilbroner est l'auteur du best-seller The Worldly Philosophers (1953). Cet ouvrage à l'immense succès, qui porte sur les idées des grands économistes (Adam Smith, Karl Marx, Joseph Schumpeter, John Maynard Keynes, etc.), a très probablement contribué à masquer ses importants autres travaux sur la politique économique, le capitalisme, le socialisme, le problème environnemental, la croissance démographique, etc. Heilbroner s'est toujours montré très critique à propos de l'orientation prise par les économistes modernes dénonçant tout particulièrement la nature a-historique et dépolitisée de leurs travaux. Il propose comme alternative une approche située et historique qui tienne compte des dimensions sociales, politiques et morales des changements économiques. Cet ouvrage, qui offre une analyse et une traduction de deux textes inédits, est une invitation à découvrir les idées d'Heilbroner, inquiet du devenir des sociétés modernes, et qui a toujours cru en la fécondité des sciences sociales.