Crime, État et société en France à la fin du Moyen Âge
Au Moyen Âge, partout régnerait la violence, expression exacerbée de la brutalité des moeurs. Une étude quantitative strictement menée à partir des lettres de rémission émises par la Chancellerie royale, des archives du Parlement et du Châtelet donne une autre image du crime dans le royaume de France aux XIVe et XVe siècles. Certes la violence existe, et l'homicide constitue, en nombre, le premier des crimes capitaux. Mais il est loin d'être le plus grave. Non que la vie d'un homme soit sans valeur, mais que vaut-elle si la renommée est bafouée ? La société est en tout lieu régie par un code de l'honneur que partagent toutes les couches sociales. Pour saisir la portée de ces valeurs communes, il convenait de faire appel aux sciences humaines que sait utiliser l'historien, le tout servi par l'outil informatique. La population des coupables et des victimes ainsi que les solidarités qui se tissent autour du criminel sont analysées en des termes aussi exhaustifs que possible. Quant à l'étude des gestes et des mots qui servent à dire le crime, elle ouvre sur un autre registre : celui du politique. Or le roi de la fin du Moyen Âge, en France, continue, malgré les théoriciens réformateurs et les praticiens d'une procédure devenue de plus en plus complexe, à résoudre les crimes capitaux par le droit de grâce que lui confère son pouvoir sacré plus que par la rigueur de sa justice. Le crime et la violence ont pu contribuer à construire la société et l'État en même temps qu'ils en menaçaient l'existence. Comment tous, hommes de pouvoir, rois et juges, mais aussi l'opinion publique qui reste en fin de compte maîtresse du jeu, ont-ils manipulé le crime ?
Été 1985, un an après la création de la première association de lutte contre le sida fondée par Daniel Defert, le sociologue Michael Pollak engage une enquête sur les homosexuels et le VIH. Avec son équipe, il mène à Paris une série de longs entretiens avec des personnes vivant avec cette maladie; ils rencontrent aussi des proches des malades. Par des mots simples, avec pudeur et courage, une femme témoigne ici du surgissement de cette épidémie dans sa famille et de l'homophobie qui régnait alors et qui est encore l'un des maux de nos sociétés.
Penser les discordances des temps avec Christophe Charle
Dans son livre Discordance des temps. Une brève histoire de la modernité, paru en 2011, Christophe Charle reprend les différents objets et questionnements qui traversent toute son œuvre pour élaborer une histoire sociale et culturelle de l'idée de modernité. Dans le sillage de cet essai, le présent recueil explore la question des temporalités en étudiant les tensions, les décalages et les distorsions qui n'ont cessé de modeler, depuis deux siècles, les visions du passé et de l'avenir.Adoptant des démarches et approchant des terrains variés, les auteurs ici réunis ont pour point commun de fonder leurs interrogations sur celles formulées par Christophe Charle, dans un dialogue nourri. Qu'il prenne la forme d'essais de synthèse —sur l'État moderne, l'expérience de l'exil ou la Commune —, d'études de cas autour d'événements qui font rupture (1871, 1945, 1968), ou de portraits d'intellectuels, tels ceux de l'abbé Grégoire ou Jacques Ellul, ce projet articule le concept de modernité à chacune des sociétés ici étudiées qui l'a expérimentée.Cette approche anime les recherches et guide les travaux de la plupart des ancien·ne·s étudiant·es ou des proches de Christophe Charle qui ont accepté de contribuer à ce livre d'hommages, dont l'ambition est bien de passer d'une histoire hors-sol de la modernité à une histoire sociale et culturelle des expériences du temps et de l'avenir. Déjouant la difficulté d'accès aux sources comme à la parole des acteurs, écrire une histoire des pratiques de construction du temps social a aussi consisté à approfondir un travail collectif engagé depuis plusieurs décennies en l'inscrivant au présent des crises à répétition de la modernité.
Le volontariat international combattant dans la guerre d'Espagne (1936-1938)
La guerre d'Espagne s'est singularisée par le surgissement d'un phénomène considérable bien qu'inattendu: l'arrivée de dizaines de milliers d'étrangers désirant prendre part aux combats. Très majoritairement antifascistes, ils se sont dispersés dans différentes formations combattantes internationales, dont les plus fameuses furent les Brigades internationales mises sur pied par le parti communiste. D'autres ont quant à eux choisi de rejoindre le camp ennemi, précisément par anticommunisme. Cet ouvrage propose de replacer cet épisode célèbre du XXe siècle dans une continuité historique, celle du phénomène du volontariat international combattant, déjà prégnant au XIXe siècle. Il faut pour cela s'émanciper des perspectives qui faisaient des Brigades internationales une séquence inédite et unique pour regarder le phénomène dans son épaisseur, sa pluralité et sa complexité. Durant deux ans, les volontaires internationaux ont combattu dans la guerre civile espagnole selon des modalités propres, souvent concurrentielles, et des attentes diverses, non sans désillusions, déceptions et renoncements. Au-delà des disparités, des affrontements politiques et des controverses mémorielles, le mouvement qui a conduit ces dizaines de volontaires étrangers à venir combattre en Espagne a reposé sur un souffle puissant — ce phénomène exaltant que Malraux a baptisé " illusion lyrique ", et que l'on observe, aujourd'hui encore, dans les conflits armés contemporains.
La construction d'une identité universitaire en France (XIIIe-XVe</SUP< siècle)
L'an 2000 marque le huit centième anniversaire des privilèges accordés aux écoliers parisiens, par le roi Philippe Auguste, considérés comme la première étape vers la création de l'Université de Paris.Le présent ouvrage montre que les privilèges royaux contribuèrent à doter les universitaires d'un statut particulier, qui finit par les distinguer des autres clercs dans la société médiévale. Les archives, parcourues jusqu'au milieu du XVe siècle, suggèrent que le Parlement devint, pour les gens d'études du nord de la France, le lieu de défense de leurs droits et d'affirmation de leur identité. Chaque université se disait alors la " fille du roi ".Associée depuis ses débuts à la grandeur du royaume, l'Université de Paris légitima sa position par le mythe de la translatio studii. Plus tard, elle revendiqua la responsabilité singulière de conseiller le roi par la bouche de ses docteurs en théologie. Lors des nombreux conflits politiques qui marquèrent le règne de Charles VI, elle multiplia ses interventions auprès du Parlement et du Conseil royal.
Le présent volume rassemble les actes du colloque " "Arriver" en ville : les migrants en milieu urbain au Moyen Âge. Installation, intégration, mise à l'écart ", qui s'est tenu à l'École normale supérieure de Lyon les 24 et 25 février 2011. Cette rencontre visait à interroger la place jouée par les migrations à destination des villes dans la construction du groupe social urbain et dans sa façon de vivre et de s'approprier la ville et, en retour, comment celle-ci les transforme. Si, quantitativement, l'importance de cette mobilité urbano-centrée est en général avérée dans les phases de croissance urbaine, comment celle-ci s'inscrit-elle dans les trajectoires personnelles, dans les parcours individuels des hommes et des femmes qui franchissent, au Moyen Âge, les portes d'une ville ? C'est seulement, semble-t-il, à cette échelle d'analyse que l'on devrait être capable de distinguer, au-delà des contraintes politiques ou institutionnelles déjà évoquées, les " stratégies " d'implantation en ville et d'accès à la ville de ces nouveaux arrivants et leur insertion dans un nouvel environnement social. Cette réflexion collective souligne combien l'étude des migrations s'avère être un jalon important pour une histoire comparée des villes.
Depuis une quinzaine d'années, les études sur Montesquieu se sont profondément renouvelées. Le corpus lui-même, grâce aux Œuvres complètes en cours, et notamment avec la première publication intégrale du manuscrit de travail de L'Esprit des lois, offre des perspectives inédites. Mais c'est aussi l'approche même qui a changé: la diversité des questions et des thèmes que son œuvre permet d'aborder élargit le champ de la recherche, de la philosophie morale et politique à l'histoire ou l'anthropologie, ou encore à la pensée du droit et de la société. Ce volume en tire méthodiquement les conséquences. Dans la perspective de l'édition critique des Œuvres complètes de Montesquieu, c'est à une relecture non pas radicale, mais en finesse et en profondeur qu'invite ce volume, en développant le rapport entre l'homme et la société, en redessinant la relation aux grands massifs de la tradition philosophique d'une pensée dont on suit jusqu'à son terme la logique, en suggérant des relations inédites à travers des rapprochements qui s'imposent, mais n'avaient pourtant guère été faits: ce qui restait informe ou informulé s'est éclairé, ce dont on devinait l'importance s'est approfondi. Ensuite, que restera-t-il à (re)lire? L'Esprit des lois.