La théorie des types a été introduite par Bertrand Russell pour éviter les paradoxes qui apparaissent en mathématique si l'on utilise de manière trop naïve la notion de collection d'objets. Cette notion de types a été raffinée par la notion de type dépendant, dans le but de représenter les preuves mathématiques sur ordinateur, et de pouvoir ainsi vérifier la correction de ces preuves. Cette idée d'utiliser ainsi l'ordinateur connaît depuis quelques années un grand développement (vérification de la preuve du théorème de l'ordre impair ou, plus récemment, d'un résultat non trivial de Peter Scholze). Indépendamment de ce rôle important pour la formalisation des preuves mathématiques, la notion de type dépendant présente un intérêt conceptuel intrinsèque en logique et en informatique, à travers la correspondance de Curry-Howard entre types et propositions. Certains résultats plus récents indiquent que ce formalisme permet de formuler des propriétés nouvelles sur une des notions de base de la mathématique: la notion d'égalité, avec un rapprochement inattendu entre des questions de base de la logique et de la théorie abstraite de l'homotopie.Ce livre retrace l'histoire récente de ces découvertes, aussi bien autour de la vérification des preuves sur ordinateur que de la synergie qui est en train de s'établir entre la théorie des types dépendants et la théorie de l'homotopie.Cet ouvrage est issu de la leçon inaugurale prononcée au Collège de France le jeudi 13 mars 2025 par Thierry Coquand, professeur invité sur la chaire annuelle Informatique et sciences numériques pour l'année académique 2024-2025.
L'écologie est la science des interactions entre les êtres vivants et leur milieu; ce milieu est lui-même constitué d'autres êtres vivants, eux-mêmes en interaction avec leur milieu, et d'autres êtres vivants. On voit bien que l'écologie est une discipline qui traite de phénomènes complexes. Et c'est certainement cette complexité, fascinante et défiante, qui constitue l'un des éléments les plus intéressants des études en écologie. Même lorsque les systèmes semblent simples, ou les interactions logiques, cette complexité souvent discrète nous révèle alors des paradoxes parfois surprenants. La plupart du temps, ces paradoxes ne sont qu'apparents, et dus à notre vision partielle des systèmes étudiés. Quelques décennies d'études nous ont appris que la seule façon d'appréhender la biodiversité, et l'écologie qui l'étudie, est de manière globale, holistique. À travers des exemples de travaux qui ont jalonné ma carrière de chercheur en écologie, cette leçon inaugurale va cheminer de paradoxe en paradoxe, pour montrer comment la complexité en écologie nécessite une approche holistique.Cet ouvrage est issu de la leçon inaugurale prononcée au Collège de France le jeudi 27 mars 2025 par Franck Courchamp, professeur invité sur la chaire annuelle Biodiversité et écosystèmes pour l'année académique 2024-2025.
Les inégalités de santé représentent un enjeu majeur de justice sociale. Si nombre de déterminants sociaux de la santé ont été identifiés, l'analyse des processus qui produisent ces inégalités reste à approfondir. L'approche sociologique considère qu'elles représentent l'une des manifestations les plus saillantes de l'inscription des structures sociales dans les corps. Il importe ainsi, dans une perspective intersectionnelle, d'appréhender les rapports sociaux de pouvoir – renvoyant aux positionsde genre, de classe et de race – qui façonnent les pratiques. Cette approche invite aussi à ne pas appréhender le biologique indépendamment du social mais à penser l'interaction complexe entre ces deux dimensions. Elle engage enfin à analyser les pratiques de santé au sein de trajectoires de vie, de la naissance jusqu'à la mort, des atteintes à la santé jusqu'à la prise en charge par le système de soins.Cet ouvrage est issu de la leçon inaugurale prononcée au Collège de France le jeudi 3 avril 2025 par Nathalie Bajos, professeure invitée sur la chaire annuelle Santé publique pour l'année académique 2024-2025.
Le carbone est un des éléments majeurs de la vie sur Terre. Il intervient dans un grand nombre de processus modulant le climat de la Terre, l'augmentation du CO2 dans l'atmosphère étant par exemple la principale cause du réchauffement climatique. La photosynthèse est un moteur du cycle du carbone, avec des échanges permanents entre les grands réservoirs que sont l'océan, l'atmosphère, les sols et la végétation. Ce livre décrit ce cycle, sa modification induite par les activités humaines et les systèmes d'observation, dont les satellites, qui ont été mis en place pour quantifier les échanges et comprendre les mécanismes sous-jacents.Cet ouvrage est issu de la leçon inaugurale prononcée au Collège de France le jeudi 7 novembre 2024 par François-Marie Bréon, professeur invité sur la chaire annuelle Avenir commun durable pour l'année académique 2024-2025.
En combinatoire, ce ne sont pas tant les problèmes et les résultats qui ont un intérêt, mais plutôt les méthodes et les techniques qu'il faut développer pour les résoudre. Certains problèmes sont simples à énoncer alors que les solutions sont complexes ; ou bien nous utilisons des hypothèses faibles, mais les conséquences peuvent être d'une richesse surprenante ; certaines démonstrations sont courtes et faciles à comprendre, mais ingénieuses et difficiles à découvrir. Bien que les objets étudiés, comme les graphes ou les familles de sous-ensembles d'un ensemble fini, présentent un intérêt purement mathématique, les résultats s'appliquent à de nombreux autres domaines, tels que l'informatique, l'économie ou l'épidémiologie.
Composer n'est pas démontrer. Composer, c'est inventer des impulsions et des flux. C'est comme l'eau d'une rivière. Composer, c'est inventer des chemins de traverse, des éloignements, des distances. C'est comme fuir et s'enfuir toujours. Mais composer, c'est long. Et lent. Très lent. Très, très long et lent... Ça n'avance jamais. C'est parce qu'on ne sait pas ce que ça va devenir. La question paradoxale, ça n'est pas d'achever mais comment ne pas finir. Composer, c'est ne jamais finir. Ça prendrait beaucoup trop de temps de finir, c'est-à-dire tout notre temps. Et pour autant, nous n'aurions jamais fini. (P.D.)
Comment expliquer le paradoxe fondamental de la matière vivante, qui allie stabilité et robustesse des formes à une dynamique interne constante ? Ce n'est pas seulement l'information génétique contenue dans les cellules, mais aussi les processus biochimiques et moléculaires observables in vivo qui sont à l'œuvre dans la morphogenèse. S'y ajoute la contribution essentielle des forces mécaniques qui, de la molécule au tissu, modèlent l'organisme. La dynamique du vivant émerge ainsi du contrôle biologique et des contraintes physiques à toutes les échelles. Son étude réunit aujourd'hui une communauté interdisciplinaire en pleine expansion qui observe, analyse et modélise le vivant.
L'idée que je me fais d'une théorie en biologie est assez éloignée de cette biologie théorique, mise en équations de phénomènes observés ou photographiés. J'en ai une conception plus simple, plus concrète. Non pas cette description mathématique de ce qui est vu, mais un modèle évolutif, un outil bricolé, avec des mathématiques peut-être, mais aussi de la langue naturelle, et qui sert avant tout à comprendre ce qu'on ne voit pas, à deviner, sous le visible, l'invisible du vivant, sa " logique " sous-jacente.
Dans les années 1920, une théorie mathématique (la diagonalisation des matrices) et une question physique (la détermination du spectre des atomes), nées indépendamment, se sont rejointes pour donner naissance à la mécanique quantique et à la branche des mathématiques appelée " théorie spectrale ". Celle-ci intervient dans toute équation d'évolution linéaire, dont elle décompose les solutions en une superposition de solutions stationnaires dites " modes propres ", qui vibrent à des " fréquences propres " : ces fréquences constituent le " spectre ".Située à l'intersection de plusieurs communautés mathématiques, la géométrie spectrale vise à comprendre le lien entre la géométrie initiale d'un objet et son spectre de vibration. L'autrice entreprend de retracer l'histoire de ce domaine très actif à travers quelques grands thèmes de recherche passés et actuels.
Combinant ethnologie et psychologie cognitive, Maurice Bloch mène un nouveau type de recherche dans le petit village de la forêt orientale malgache où il travaille depuis plus de trente ans. Utilisant des tests élaborés aux États-Unis, il ne cherche pas seulement à comparer le développement cognitif des enfants malgaches avec celui des enfants américains : au lieu d'importer une grille d'interprétation développée par les scientifiques, il demande aux villageois d'interpréter eux-mêmes les résultats de ces expériences. De quoi remettre en question certaines idées reçues et ouvrir de nouvelles pistes.
Le stockage et la conversion de l'énergie sont un des grands défis scientifiques des prochaines décennies et un enjeu environnemental majeur. Quels nouveaux matériaux vont permettre de fabriquer des batteries plus efficaces et plus " propres " ? Jean-Marie Tarascon fait le point sur ces questions qui concernent notre avenir et celui de la planète. Il présente notamment les technologies à ions Lithium, l'apport des nanotechnologies, et les recherches visant à l'élaboration de matériaux par des méthodes " bio-inspirées " : l'utilisation de matériaux d'électrodes provenant de la biomasse et obtenus par " chimie verte ".
Après des décennies d'études descriptives, la biologie du cancer vit une véritable révolution : les approches génétiques ont permis d'identifier beaucoup des dérégulations cellulaires susceptibles d'entraîner des tumeurs. Un traitement combinant arsenic et acide rétinoïque cible la protéine responsable de la leucémie promyélocytaire. Ce traitement, qui a permis de guérir la quasi-totalité des patients, suscite l'espoir que la compréhension intime des mécanismes de la cancérogénèse puisse bientôt déboucher sur de nouvelles approches thérapeutiques transposables à d'autres cancers.